Dans l’ambiance actuelle où la pathologisation du haut potentiel est décriée vertement, au delà même de la réalité du terrain, cet article a attiré mon attention et a inspiré ce billet (bon..ok… une amie a attiré mon attention sur cet article !).

Je suis la première (meuh non….. on est tous à le dire… je n’ai jamais entendu dire autre chose de la part de responsables d’associations, de médecins, de psychologues, d’enseignants, de bloggeurs) le Haut Potentiel est une chance…. mais parfois… il faut savoir passer des gués peu praticables pour avoir l’occasion de s’en rendre compte.

Ces gués sont divers… mais ils se trouvent (trop) souvent sur le terrain de l’école.

Combien d’ados HP se plaignent de l’école. Comme bien d’autres direz vous.

  • Parce que les relations sociales sont délicates ? Parfois.
  • Parce que les cours sont ennuyeux? Souvent.
  • Parce que ils sont harcelés?

Comme il est « à la mode » ce sujet là.. Le Harcèlement! (d’ailleurs, je manque rarement l’occasion d’écrire un billet sur ce sujet qui me tient à coeur).

 

 

(extrait de l’article) On parle souvent de harcèlement à l’école. Curieusement on ne dit rien du phénomène suivant qui est pourtant très bien documenté et inquiétant et dont les professeurs ont souvent fait état dans l’indifférence générale : dans beaucoup de collèges et de lycées, ce sont les bons élèves, les “intellos” qui font l’objet de harcèlement.

 

Dans mon expérience personnelle, j’ai toujours trouvé difficile de savoir si ce qui se passait était du domaine du harcèlement ou de l’immaturité de certains. Je suppose que la réponse est à trouver dans la manière où l’enfant reçoit les choses. C’est à lui de dire si cela relève du harcèlement ou pas. Et le curseur varie, d’une personne à une autre.

Alors, il y a (malheureusement) mille raisons de se retrouver harcelé. Mille raisons dont une ou deux pourront amener à l’irréparable.

Il suffit d’être roux comme Mattéo, qui s’est suicidé à 13 ans à Bourg SAint Maurice.
Il suffit d’être en surpoids comme Brandy, qui s’est suicidée à 18 ans.
Il suffit de n’avoir pas la bonne couleur de peau, pas les bonnes baskets, pas la bonne religion, pas le bon look…

Mais, il y a aussi une raison qui revient très trop souvent.. celle d’être bon élève, l’intello de la classe…

Si aucune raison n’est excusable, celle d’être, dans le lieu dédié à la connaissance, intéressé par la lecture, les mathématiques, l’histoire ou les sciences… celle d’avoir des aptitudes particulières pour cela… celle d’avoir envie d’apprendre et d’y arriver… l’est encore moins.

Non pas que je veuille mettre une hiérarchie dans l’inacceptable. Mais si le harcèlement arrive par les enfants ou les collégiens, il ne persiste que le « laissé faire » des adultes.

J’entends tellement souvent que l’on attribue à l’école des missions qui ne sont pas les siennes… mais préserver les enfants qui veulent seulement apprendre..  on peut considérer sans ambages que c’est bien une de ses missions non!!

Parfois, comme Alex, on cumule… gros et intello… Il s’est suicidé en 5° en 2015.
Parfois comme Marion, on ose demander un peu de silence pour pouvoir travailler… elle se suicide à 13 ans (« Marion, 13 ans pour toujours » de Nora Fraisse sa maman).

(extrait de l’article) Cumulant les “handicaps” de plusieurs profils de bouc émissaire, on n’ose pas imaginer ce qu’il advient, parfois, dans l’école d’aujourd’hui, dans certains “endroits” oubliés par la République, des filles intellos, lectrices, soucieuses de bien faire, timides, anxieuses mais aussi en surpoids, n’ayant pas le bon  profil ethnique ou religieux et n’ayant, pour faire valoir auprès de l’établissement et de l’institution scolaire, leur droit à la paix, la sécurité, parfois simplement leur droit à l’existence, qu’une mère agent d’entretien qui parle mal le français.

Alors, le haut potentiel, les aptitudes scolaires, la soif d’apprendre… c’est une chance.. une très grande chance.

Mais il ne faut pas négliger que c’est parfois, souvent, toujours, rayez les mentions inutiles, une cause de harcèlement. Qu’elle tombe sur des enfants qui ne savent pas encore gérer leur hypersensibilité… et que ça peut devenir dramatique…

(extrait de l’article) Étonnant silence. Indécent oubli ! Criminelle abstention. Le harcèlement, les études le montrent, concernent très souvent de bons élèves parfois de brillants élèves et qui viennent assez souvent de milieux défavorisés. Ces élèves ni leurs parents n’ont les moyens, matériels et moraux, de se défendre ou de soustraire leur fils ou leur fille à ce qui peut parfois devenir un enfer. Cela est-il acceptable ?

Certains n’auront jamais le temps de traverser le gué pour connaître tous les avantages de leur douance.

D’autres s’en sortiront mieux. Parce qu’ils auront reçu une écoute, une aide, un geste au bon moment. Parce qu’ils auront eu de la chance. Ou un caractère plus trempé. N’empêche que si ils éviteront les issues fatales, ces « années collèges » leur laisseront des souvenirs autrement moins sucrés que ceux de la série canadienne des années 80.

Je sais bien que ces ados ne sont pas la majorité des élèves… mais ils sont là… et nous devons tout faire pour qu’ils rejoignent, sains et saufs, l’autre rivé du gué.

(extrait de l’article) Une anecdote qui en dit long pour terminer: dans un bon collège avec des enfants de cadres supérieurs, un élève me [ndlr: c’est le professeur qui témoignage] cite lors d’un débat une émission qu’il a vu sur Arte parlant d’égyptologie. Les moqueries de ses camarades fusent : “Arte !?! tu regardes ça! Trop mort de rire ! Le bouffon !”

Je suis certaine que chacun en connaît un ou une. Et je pense toujours en écrivant sur le harcèlement à cette belle ado HP, qui est aujourd’hui une brillante lycéenne, et dont la mère, mon amie, sait la chance qu’elle a de pouvoir encore lui dire bonjour chaque matin….

La Zébrette dans tout ça? Je ne pense pas qu’elle ait jamais été « harcelée ».  Il y a eu souvent, des comportements limites et j’ai hésité, à chaque fois, entre l’aider à prendre du recul ou monter au créneau.

Intello? Oui, on le lui dit régulièrement. Mais elle m’explique que ce n’est pas une insulte. Qu’elle préfère qu’on la « traite d’intello » que de recevoir le bonnet d’âne.

Je me souviens de sa réflexion en CM1. Elle avait 7 ans. Un groupe de « grands » de CM2 qui la traitaient d’intello,  lui avaient demandé de « prouver » ses capacités.. Ils lui avaient soumis, durant la récré, des questions de maths qu’elle avait réussies. L’un d’eux a lâché « mais comment elle fait? ». Et du haut de ses 7 ans, pas impressionnée, elle a répondu « je suis comme vous.. j’ai un cerveau… mais moi .. je m’en sers! Vous pouvez faire pareil! ».

Pas du tout certaine que 4 ans plus tard, elle ait la même répartie ou que cette répartie ait le même effet de rendre mutique les enquiquineurs et de faire cesser tous ces comportements.

Aujourd’hui, Zébrette est bien intégrée dans sa classe. Elle est invitée, invite. Ca ne l’a pas empêchée de me dire ce soir, à propos d’un camarade de classe « Lui ? non.. lui c’est moi au masculin. Il est seul et n’a pas d’amis« .

Sans être terrorisé par chaque jour d’école, sans transformer une chamaillerie en agression, sans exagérer notre côté parent-hélicoptère… restons vigilants devant les signes qui pourraient nous faire penser que………..

 

9 thoughts on “Le cauchemar des bons élèves

  1. Bonjour,
    j’ai parcouru en diagonale ton article. Il m’est venu rapidement l’intuition qu’il y a une cause bien plus invisible au harcèlement des élèves qui sortent du « lot ». J’ai moi-même subit ce harcèlement à différentes époques de ma vie et sous différentes formes.

    Je dirais que la première forme de harcèlement est silencieux. C’est une sorte de « bannissement », on te met hors du groupe. Tu es obligé de regarder de l’extérieur la vie du groupe d’élève parce que tu ne lui ressemble pas assez, tu n’as pas ses attributs identitaires. Tes seuls amis sont les autres « exclus ».

    Puis il y a deux formes de harcèlement , agressives, celle où on s’en prend moralement à toi par des moqueries incessantes et destructrices et celle où on t’agresse physiquement par des petits gestes quotidiens qui se veulent anodins ou de la violence directe.

    Puis il y en a une autre, bien plus insidieuse, plus destructrice encore, qui est peut-être à l’origine de toutes les autres.

    En stage en école primaire j’ai pu l’observer de manière évidente. subie par des élèves soit reconnus comme déficients ou une élève surdouée mais non identifiée comme telle.
    Lors de ce stage j’ai noté beaucoup de phrases positives étayant l’attitude les élèves comme celles, négatives voir agressives, les déstabilisant. Et ces phrases étaient prononcées par le professeur des écoles. Un professeur reconnu officiellement comme ayant la capacité d’accueillir des stagiaires en master pro MEF à l’ ESPE.

    J’ai pu observer que tous les élèves qui sortaient de « sa norme », de sa représentation de ce que doit être un élève, subissaient régulièrement des attaques verbales sous forme d’humour, de moquerie ou de « rappel à l’ordre ».

    En tant qu’étudiant à l’ ESPE, j’ai subi également ce harcèlement. Non pas des autres étudiant(e)s puisque j’avais bien 20 ans de plus qu’eux et une attitude affirmée qui ne le permettait pas, mais des « formateurs ». J’ai toujours posé des questions par soif de comprendre, j’ai toujours fait à ma manière…. et cela n’était pas toléré à l’ESPE. Des profs m’avaient bien prévenu avant d’y aller, mais tant qu’on ne l’a pas vécu, difficile d’y croire.

    Deux exemples parmi d’autres : mon rapport de stage et une fiche de préparation en arts visuels.
    Dans mon deuxième rapport de stage, j’ai présenté l’école, la classe, bref une mise en perpective du cadre d’observation et d’intervention avec, en autres, un dessin de la classe vue du dessus, permettant de la visualiser entièrement dans son organisation tant matérielle que pédagogique, puis en deuxième partie j’ai présenté mon observation des « phrases étayantes ou destructrices du professeur ». Je peux vous affirmer que j’ai pris des pincettes, que j’ai soigné la présentation et bien structuré l’affaire ( j’ai eu 15 à mon mémoire de licence sans l’aide de personne donc je sais y faire). Eh bien un professeur est venu me voir pour me dire : « on a tout fait pour tirer la note vers le haut et essayer de te donner la moyenne mais …. ».
    La fiche de préparation en arts visuels. Une fiche de « prep » sert à prévoir une séance pédagogique dans ses moindres détails bref à préparer un cours. Il fallait en faire une sur un artiste. J’ai attendu que tout le monde ait rendu sa fiche et l’ait reçue annotée et notée. j’ai « emprunté » celle d’une étudiante qui avait eu 16/20. J’ai donc tenu compte de toutes les remarques de la formatrice et j’ai amélioré sa fiche. Je l’ai rendue en m’excusant du retard, ce qui n’a pas posé de problème. Je m’attendais à avoir une note supérieure puisque j’avais amélioré selon les attentes de la formatrice….Elle fut inférieure…

    Je pourrais vous citer d’autres exemples en maths, en français, en musique, en sciences….de brimades vous invitant à rentrer dans leur norme.

    Savez-vous que tout étudiant, à un examen blanc préparatoire au concours de recrutement des professeurs, qui répond sincèrement à une question de manière analytique et créative se prend une mauvaise note et se voit conseiller d’apporter la réponse « attendue » pour être recruté par le filtre du concours ( CRPE)?

    Donc, par ma démonstration je montre simplement le fait qu’il est probable que la source du harcèlement scolaire n’est pas que le comportement des enfants ou élèves, qui ne sont que le relais, le reflet de l’institution.
    Un professeur dont la mission est de normer les comportements, de diriger un groupe selon un rythme institutionnel et non adapté à chacun, de sanctionner tout ce qui sort de la norme scolaire…Eh bien je dis qu’il est fortement probable qu’il soit le bras « officiel » de ce harcèlement, mandaté par l’institution. Et que les élèves, de par les effets régulateurs du groupe ( mécanismes connus en sociologie) n’en sont que l’extention logique.

  2. Merci pour cet article qui réveille des choses en moi et qui fait écho avec une discussion récente avec mon zèbre de 13 ans : « Pourquoi tu ne proposes jamais tes solutions en cours? » « Tu rigoles ou quoi ? je vais pas passer pour l’intello ? Y a déjà assez de T. . Mais lui, il s’en fout, il est super bon en tout, je sais pas comment il fait. » « Ben le T., je le connais, outre le fait d’être très probablement hp, il fait des vrais devoirs à la maison contrairement à vous (son frère ainé est pareil -> devoirs = exercices + un minimum de relecture la veille des évaluations) » « Ouais, mais ça sert à rien, j’ai assez de moyenne… » Vala vala… Il existe un vrai problème de regard de la communauté scolaire sur la réussite et à part dire aux élèves « Vous devez participer plus à l’oral », les profs ne cherchent pas vraiment à corriger (ne savent pas ?) ces ambiances de compétition vers le bas (ou au moins la moyenne). Cela renforce le sentiment qu’il faut être dans la norme pour être tranquille… Dans une famille de zèbres caméléons, c’est un vrai piège que je tente de déjouer à force de discussions pour qu’ils assument leurs différences. Pas simple mais la vigilance est de mise!

  3. <3
    a la fin quand on a fini par la changer de collège les profs ont même fini par dire a son père ''ben oui mais elle a 18 de moyenne en physique" …au final même les profs justifiaient toutes ces années par ses bonnes notes…

      1. En fait c’est arrivé sur la fin quand ils ont senti qu’ils ne dominaient plus du tout la situation! au tout début le discours était contraire et tout aussi inacceptable pour moi  » tu es une très bonne élève si on doit virer quelqu’un une personne qui a 5 de moyenne ne nous manquera pas) parce que une partie de ses harceleurs étaient de mauvais élèves mais merde ça n’a rien a voir!!! ce n’est pas non plus parce qu’un élève a de mauvaises notes qu’il va harceler les autres…Mais quand ça a pris une telle ampleur que de bons ( très bons même) élèves étaient dans le lot là le discours était différent…et avec ses super moyennes elle cherchait…et puis bon vu que ses notes ne baissaient pas elle ne devait pas aller si mal non plus…

  4. malgré cela ils ont de la chance ceux qui sont bien entourés par leurs familles , d’avoir un repère pour souffler a la maison ,tant le temps passé a l’école peu être anxiogène dans l’indifférence la plus total.. et ça s’arrange pas par la suite malheureusement ou les coups bas fusent .

    1. mais parfois ils n’osent pas souffler à la maison. Malgré la famille, malgré les repères. Pour ne pas inquiéter, par peur de descendre dans l’estime parental… ils m’inquiètent ceux là…et ceux-là peuvent être le fils ou la fille des mes amies ou de mes voisins … la mienne…

  5. j’ai eu la chair de poule et les larmes aux yeux, parce que oui c’est ça, passer pour l’intello de service, ne pas forcément savoir trouver sa place, avoir ou non de la répartie, tout ça caché derrière une hypersensibilité qui perce parfois au collège, et souvent à la maison.
    J’ai l’impression que tu décris mes années lycée, je n’étais plus intello, j’ai tout lâché pour espérer être tranquille, ça n’a pas fonctionné.. heureusement j’avais des très bonnes amies…
    Je ne suis pas HP, (ou en tous cas pas diagnostiquée), ma fille tout juste10 ans, en 6e l’est, et je revis par procuration ces années difficiles.
    Je suis une maman hélicoptère/louve/poule/lionne… toujours en alerte, toujours prête à intervenir.
    Et puis, parfois, comme hier soir, elle craque, elle se sent nulle, les autres ne laissant pas par leurs mots cruels parfois, je soutiens, réconforte, redonne le sourire en tentant de garder le mien, puis m’effondre seule dans mon coin… c’est dur… très dur parfois/souvent.
    Et quand on ajoute la fratrie qui a aussi sa complexité, ses soucis, et bien on essaie d’avancer tout en restant extrêmement vigilant.
    Merci pour ton article, tellement vrai !

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